Situé au cœur de la ville de Lomé, en plein quartier populaire de Nukafu, l’atelier Eric Wonanu a servi de vitrine à plusieurs artistes plasticiens togolais et leurs œuvres. Mais contre toute attente, le plasticien et curateur Eric Wonanu, dont l’atelier porte le nom annonce sa fermeture. Le lieu conservera néanmoins sa fonction initiale d’atelier dédié aux travaux du peintre.
Telle est ma quête, exposition du plasticien et musicien Médjéva Ayéva prendra fin ce 25 mars 2023. Ce sera sans doute la dernière qu’accueille l’atelier Eric Wonanu, en attendant une prochaine réouverture aux calendes grecques. L’annonce publiée sur la page Facebook du propriétaire des lieux ne fournit aucun indice.
Jeudi, 22 mars. A 14h, Eric Wonanu débarque à son atelier, accompagné de deux jeunes férus de la culture, Daniel Komlan et Wody Yawo. L’artiste peintre reconnu pour son travail remarquable dans l’art contemporain africain vient directement de l’Université de Lomé où il a assisté, en qualité de modérateur, à la conférence sur la question de la restitution des biens culturels du Togo en Allemagne. Eric n’a qu’une heure à consacrer aux éventuels visiteurs de Telle est ma quête, puisqu’à 15h, il doit retourner au temple du savoir. Paré d’une belle chemise en pagne, il accepte et parle, autour d’une table, des motivations qui sous-tendent la suspension des expositions à son atelier.
« Une expo est très lourde à porter »
L’atelier Eric Wonanu a accueilli trois expositions en une année. « C’est beaucoup », selon le curateur et artiste peintre, parce qu’organiser une exposition est épuisant. « A la fin de chaque exposition, je suis épuisé intérieurement et physiquement. Une expo est très lourde à porter », lance-t-il. Il y a ensuite les dépenses, élevées, issues de fonds propres – même si cela n’est pas rédhibitoire pour le projet d’une galerie dans une ville/un pays qui en compte très peu. Le clou reste la mise en parenthèse de son travail d’artiste qu’empêchent les expositions.
Il y a du travail à faire avant et après les expositions ; aussi, pendant l’expo, j’accueille tout le monde et je parle beaucoup. Or je ne suis pas galeriste, je me concentre moins sur ma carrière. (Eric Wonanu).
En fermant la porte aux expositions, « je veux tout simplement me reposer un peu. Là, je peux partir ou travailler quand je veux ». Même si à la base « Eric Wonanu » est un atelier, son propriétaire a bien voulu l’ouvrir aux autres artistes et au public. Parce qu’il estime « qu’avoir une telle place et ne pas la partager avec les autres est égoïste ».
« Pas déçu »
Qu’il s’agisse de A long way from home d’Eric Wonanu visitée par la Première ministre Victoire Dogbé, de Traits d’union de Thierry Tomety ou de Telle est ma quête de Médjéva Ayéva, chacune de ces expositions attire du monde surtout lors des vernissages. Même si après, les visiteurs viennent en compte goûte, c’est un progrès à saluer surtout dans un pays où « des gens qui ont faim ne peuvent pas aller voir des œuvres d’art. Même ceux qui n’ont pas faim ne peuvent pas aller parce qu’ils n’ont pas reçu cette éducation », souligne M. Wonanu. C’est d’ailleurs suite à ce constat qu’il a fait de son atelier une galerie.
« Notre objectif principal n’est pas de vendre mais de montrer des œuvres au public ».
En une année d’activités, les attentes semblent comblées. « On n’est pas déçu. Les artistes sont fiers d’avoir exposé leurs œuvres que de les garder dans leurs ateliers. On est content parce qu’aujourd’hui on peut aller voir des expos à Onomo, ici et ailleurs », affirme Eric Wonanu. Désormais, il pourra poursuivre librement son travail d’artiste. Il explore, à travers ses œuvres, des thèmes liés à la culture africaine et à l’identité.
Elisée Rassan
